Pour le gouvernement, la guerre dans l’Est du pays ne peut nullement se dénouer par la voie des négociations. A Kinshasa, la crise de l’Est de la RD Congo ne peut faire l’objet d’aucune concertation ou d’une quelconque négociation politique pour un éventuel partage de pouvoir. «Ceux qui se lancent dans toutes sortes de déclarations oiseuses pour exiger avec force circonlocutions un partage de postes en échange de la paix ont voulu manifestement se livrer à une pêche en eaux troubles», a averti le gouvernement, par l’entremise de son porte-parole, Lambert Mende. Aussi s’est-il engagé à rendre l’armée congolaise «encore plus performante et efficace» pour sécuriser le territoire national et ses frontières, en lançant un recrutement en masse.




       Après avoir clairement identifié le parrain de la rébellion menée par les troupes du M23, à l’occurrence le Rwanda, Kinshasa n’est pas prêt à se laisser entraîner dans une nouvelle aventure politique dont l’issue ne saurait être que le partage du pouvoir. Dans la capitale congolaise, l’on exclut l’option d’une éventuelle négociation ou d’une quelconque concertation politique en vue de sortir du bourbier de l’Est du pays.

Pour le gouvernement, les concertations de Kampala menées dans le cadre de la Conférence internationale pour la région des Grands Lacs (CIRGL) ne peuvent servir de prétexte à d’éventuelles négociations politiques avec le M23 ou les acteurs politiques nationaux. C’est dans un cadre sous-régional, notamment sous l’égide de la CIRGL, que la crise de l’Est de la RDC devait, de l’avis de Kinshasa, trouver son dénouement.

N’en déplaise, pense-t-il, à ceux qui espèrent s’accrocher à cette crise pour garantir leur avenir politique.

Les précisions de Kabila

En s’entourant samedi 4 août «du plus grand nombre possible d’avis des forces vives de la nation comprenant la classe politique et la Société civile sur une agression qualifiée contre l’Etat congolais», le président Joseph Kabila a, en sa qualité de «principal animateur», voulu «partager l’information sur la résistance à l’agression», a expliqué mardi 14 août à Kinshasa le ministre Lambert Mende, porte-parole du gouvernement, au cours d’un point de presse dans son cabinet de travail.

L’initiative présidentielle reposant sur le fait que l’agression de la RDC «impose à la majorité au pouvoir un comportement conséquent par rapport à la mobilisation générale de la nation décrétée à cet effet», il s’est dégagé de cette rencontre la «nécessité de relayer l’information à une frange plus large de représentants des forces vives».

«C’est le lieu de dire clairement pour que nul ne puisse en douter que le chef de l’Etat et son gouvernement n’ont pas voulu lancer de nouvelles négociations politiques en vue de quelque arrangement que ce soit pour un partage du pouvoir au sein de la classe politique, à l’insu et en marge de la volonté exprimée il y a quelques mois par les électeurs congolais», a affirmé le ministre des Médias, chargé des Relations avec le Parlement et de l’Initiation à la nouvelle citoyenneté.

Par conséquent, «tous ceux qui se lancent dans toutes sortes de déclarations oiseuses pour exiger avec force circonlocutions un partage de postes en échange de la paix ont voulu manifestement se livrer à une pêche en eaux troubles», a-t-il précisé.

A ce propos, le porte-parole du gouvernement a réagi aux récentes déclarations d’un «cacique sur le retour de l’ère post-mobutiste (qui) s’est ainsi répandu aux quatre vents il y a peu pour dénoncer une prétendue trahison des autorités de la RD Congo du fait de l’agression rwandaise de notre pays».

Selon le ministre Lambert Mende, «pareilles assertions reviennent à escamoter les vraies motivations de la guerre d’agression qui reposent sur l’hégémonisme et la culture prédatrice d’une phalange militaro-affairiste au Rwanda ainsi exonérée de la responsabilité des crimes contre nos populations».




Pressions sur le Rwanda

Avec la rébellion du M23, il n’est également «pas question de négociations», le gouvernement congolais estimant qu’il s’agit d’une «création» du Rwanda.

      «Il est souhaitable que nos voisins rwandais fassent l’effort de sortir d’une gestion exclusivement incantatoire de ce dossier. Ce que nous demandons à Kigali, c’est simplement de s’abstenir d’initier et d’alimenter l’insécurité au Kivu par le M23 qui est sa création et de cesser de s’immiscer dans les affaires intérieures congolaises avec de fausses allégations de pogroms anti-rwandophones ou de collusion entre le gouvernement et les forces négatives FDLR», a dit le ministre Mende.

Il a fait remarquer que «la trajectoire criminelle des terroristes des FDLR témoigne en elle-même contre les accusations du gouvernement rwandais» Il a insisté sur le fait que «des membres de cette milice criminelle arrêtés au Kivu par les FARDC et rapatriés au Rwanda avec le concours de la Monusco et du Haut commissariat aux réfugiés des Nations unies ont été remobilisés et recyclés par Kigali qui les a renvoyés en RDC prêter main forte à la pseudo-mutinerie du M23 comme l’indiquent leurs témoignages recueillis par l’équipe d’experts» onusiens.

Aussi, le gouvernement congolais se félicite-t-il des pressions, sous forme de suspension des aides, exercées sur le Rwanda et de tous les gestes de solidarité de la part de la communauté internationale en faveur des populations sinistrées.

Et autant il lui est «agréable» d’entendre la présidence française du Conseil de sécurité faire remarquer que «la réplique du Rwanda contre le rapport d’experts de l’Onu n’était pas convaincante», autant le gouvernement congolais «apprécie particulièrement» le soutien des Etats-Unis et l’exhortation de leur secrétaire d’Etat Hillary Clinton à tous les Etats des Grands Lacs, «y compris le Rwanda, à travailler ensemble pour tarir le soutien aux rebelles du M23, pour les désarmer et pour traduire leurs leaders devant la justice».

Dans ce volet diplomatique, le ministre Mende a affirmé que, «contrairement à ce que certains chroniqueurs en disent, le Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de Kampala a été un succès», dans la mesure où «c’est le point de vue de la RDC qui a été pris en compte par les 11 délégations présentes» s’agissant de la force internationale neutre.




Les FARDC recrutent

Les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), qui se trouvent dans une phase de jouvence, lancent le recrutement de nouvelles unités.

«Appel est fait aux jeunes hommes et jeunes filles du Congo de s’enrôler sous le drapeau afin de soutenir l’effort de rajeunissement de notre armée afin de la rendre encore plus performante et efficace, car sans armée, il n’y a pas de pays », a annoncé le porte-parole du gouvernement.

«On sait que tout avait été fait au cours des 15 dernières années pour torpiller toute possibilité pour la RDC de disposer d’une armée digne de ce nom. Le gouvernement est aujourd’hui en mesure de tourner cette page noire de notre histoire. C’est à cette fin que les FARDC recrutent», a-t-il expliqué.

Dans cette phase de renforcement des capacités des FARDC, le gouvernement en appelle à «plus de solidarité pour notre armée qui a trop longtemps été étouffée par des embargos de toute nature pendant une décennie entière alors que l’agresseur (Rwanda) que nous avons en face de nous pouvait sans problème continue à s’alimenter à des conditions plus qu’avantageuses en armes et munitions aux quatre coins du monde».